Cannes à Lyon : Samir Guesmi, réalisateur d’Ibrahim


Cannes Selection 2020 

 


Posté le 17.10.2020 à 15h23


 

Chaque jour, les cinéastes de la Sélection officielle Cannes 2020 nous racontent leur passion du cinéma. Parce que les films d’aujourd’hui naissent de ceux d’hier.

 

Le film classique qui vous a le plus marqué ?

Peut-être La Bête humaine (Jean Renoir, 1938). Le labeur, le prolétariat, l’élégance de ce film, le sens des ellipses, les scènes de train, le romantisme. Il y a quelque chose de très viril, la vitesse, les gueules charbonneuses, qui contracte avec l’histoire d’amour. Et Gabin, c’est là que je le préfère.

Le cinéaste dont vous avez le plus appris en voyant ses films ?

Je pense à Maurice Pialat, mais m’apparaît aussi immédiatement Claude Sautet. Et François Truffaut… Quand je vois un film de Pialat, j’ai l’impression qu’il est direct à l’os,. Il ne s’embarrasse pas d’introduction : j’ai l’impression de voir le cœur de la scène. Il y a une forme de rugosité, de quelque chose d’originel, il n’y a pas de manières. C’est comme un diamant brut.


Une scène particulière de l’histoire du cinéma qui vous a inspiré ?

Dans le premier film de Kiarostami, Le Passager (1974 :  l’histoire d’un gamin d’une banlieue qui rêve d’aller voir un match de foot à Téhéran. Il fait des économies, parce qu’il est issu d’une famille très pauvre. Il vole un appareil photo, il fait semblant de faire des photos de ses camarades, il les rackette. Enfin, il se paye un billet pour aller à la ville. Il arrive au stade, il achète son billet. Il est très en avance, il attend à l’extérieur du stade, il mange un bout de sandwich. Et là il s’endort. Quand il se réveille, on comprend que le match a eu lieu et que tout est désert autour de lui. La meilleure journée de sa vie devient la pire journée. Cette scène est d’une simplicité, d’une poésie, je la revois, j’ai l’impression que Kiarostami a touché là une forme de grâce, de perfection. Le « duende », c’est comme ça qu’on dit ?


Un acteur ou une actrice du passé que vous auriez aimé filmer ?

Cette question me flatte : on me considère comme un réalisateur, même si ne j’ai fait qu’un film, il va falloir que j’assume un peu plus. Je vais répondre Michel Simon. Si j’avais pu le filmer, je ne lui aurais rien demandé. Quand je pense à lui, je pense à l’énergie de Boudu. Mais aussi à lui en vieil acteur dans La Fin du jour. L’énergie est la même, d’ailleurs. C’est plus que la malice, le gars il a quarante wagons d’avance sur tout le monde, dans ses yeux, dans son corps. Il est en avance sur tout.


Le film classique que vous n’avez pas vu et que vous rêvez de voir ?

Je n’ai jamais vu Chronique des années de braise, de Mohammed Lakdar-Hamina (1975), qui a eu la Palme d’or. Je l’ai cherché, je ne l’ai jamais trouvé.



 

 

 



Ibrahim-visuelIbrahim de Samir Guesmi (2020, 1h19)
À cause d’un délit qu’il commet, Ibrahim met son père dans une situation délicate. Le jeune homme tente de réparer sa faute... Premier film du comédien Samir Guesmi, il reçoit quatre prix au récent Festival du Film francophone d’Angoulême.
Sortie en salles : 9 décembre 2020
Institut Lumière sa 17 16h15

Catégories : Lecture Zen