Trois traversées en noir et blanc !

 


Posté le 7.10.2020 à 16h10


 

Le cycle récurrent au festival Lumière consacré aux Grands classiques du noir et blanc cette année, pourrait bien se faire sous le signe de la traversée... grande, douce, lente, parfois légère, souvent profonde, ou motivée tout à coup par des pulsions violentes qui mènent loin. Embarquez pour l'une ou l'autre de ces traversées, il y en a forcément une faite pour vous.

 

La traversée sentimentale

L'amour hante comme une traversée périlleuse les grands films sentimentaux que sont Voyage en Italie (Roberto Rossellini, Viaggio in Italia, 1954), Les Contes de la lune vague après la pluie (Kenji Mizoguchi, Ugetsu monogatari, 1953) et Laura (Otto Preminger, 1944). Bien que très différents, ils sont frères de tourments car aimer n'y est jamais sans conséquences. "Même si tu es un esprit ou un fantôme, je ne te laisserai jamais partir" dit l'un des héros de Les Contes de la lune vague après la pluie, dans un moment d'emportement amoureux qui rejoint celui entre Ingrid Bergmann et George Sanders, couple marié au milieu de la foule, en quête d'un second souffle dans Voyage en Italie. Cette traque inconsciente après le fantasme de l'amour, l'inspecteur la pousse également très loin dans Laura. Dans ces trois oeuvres d'attente, le noir et blanc est poétique, languissant avec des dégradés de gris parfois diffus, marque de complexité pour des films qui prennent leur temps.

 

VOYAGE-EN-ITALIE-visuel



La traversée initiatique

La quête d'intériorité provoque les traversées initiatiques des films, du plus cérébral Le Septième seau (Ingmar Bergman, Det sjunde inseglet, 1957), au plus populaire Les Vacances de Monsieur Hulot (Jacques Tati, 1953). Entre les deux La Rivière rouge (Howard Hawks, Red River, 1948) et Eve (Joseph L. Mankiewicz,  All About Eve, 1950) proposent des aventures naturelle, et, sophistiquée. Le chevalier de Le Septième seau veut conjurer la mort. Monsieur Hulot veut conjurer l'ennui. Le cow boy de La Rivière rouge veut conjurer un caractère de chien qui l'empêche de vivre la vie qu'il convoite. Eve l'arriviste veut conjurer le sort social d'un passé honteux. Tous ces films posent la même question : qui êtes-vous ?

 

Septieme-sceau-visuel



La traversée politique

S'échapper, traverser pour fuir dans un contexte géopolitique exceptionnel, c'est ce que font les héros de La Grande illusion (Jean Renoir, 1937) et de Le Troisième homme (Carol Reed, The Third Man, 1949). Deux films grands témoins de l'histoire du vingtième siècle. Renoir joue avec le noir et gris afin de mieux plonger le spectateur dans une époque (la première guerre mondiale) où le ciel ne semble jamais se lever. Carol Reed opte pour l'ombre absolue, un presque noir et noir, pour incarner le jeu de dupes de l'immédiate après seconde guerre mondiale, dans une Europe centrale propice à tous les trafics protégés par la nuit d'un territoire détruit. Les films formidables de Reed et Renoir portent en eux une certaine ironie entre sarcasme et mélancolie pour constater l'inanité des conflits.

 

GRANDE-ILLUSION-visuel

 

 

Virginie Apiou

 

 

> Voir la programmation complète de la section Grands classiques du noir et blanc

Catégories : Lecture Zen