Maigret et l'affaire Saint-Fiacre

L’immense succès de Maigret tend un piège laissait présager un second volet. C’est chose faite avec Maigret et l’affaire Saint-Fiacre. Ce film connaîtra un accueil identique (trois millions de spectateurs), personne n’imaginant désormais un autre que Jean Gabin pour incarner Maigret. « Gabin "mène" ses rôles comme Maigret dans ses enquêtes. C’est la même tranquillité apparente, la même obstination, la même solidité, la même sobriété, dues à une parfaite connaissance de leurs métiers respectifs, le même humour en demi-teinte, les mêmes brusques colères et, en fin de compte, les mêmes triomphes ». (Jean de Baroncelli, Le Monde, 17 septembre 1959). L’acteur offre une nouvelle fois une solide interprétation de Maigret, donnant vie aux dialogues d’Audiard qui continuent de faire mouche auprès des spectateurs et d’une partie de la critique.

Cette enquête offre un éclairage neuf sur la personnalité et l’intimité du commissaire ; elle donne à Maigret ses racines sociales et le ramène à une enfance loin du tumulte parisien. La peinture de cette vie de province, emplie de secrets et de haines anciennes, prend presque le dessus sur l’intrigue policière. Maigret évolue dans une ambiance poussiéreuse et mortifère, à l’image de la fortune passée de la comtesse.

Pour certains, cette seconde affaire est cependant un peu décevante. L’intrigue est trop linéaire, le récit moins nerveux, les personnages moins consistants. Pour autant, on salue une mise en scène adroite, une très belle photographie et une distribution de qualité, notamment avec la grande comédienne Valentine Tessier.

 « En voyant ce film bien conçu, bien construit et supérieurement dialogué par Michel Audiard, on se laisse aller à son plaisir sans contrainte. On sait qu’avec un travailleur consciencieux et organisé, comme Jean Delannoy, on n’aura pas de choc dans l’estomac, mais pas non plus la désillusion amère qu’apportent souvent les films ambitieux mais ratés. C’est tout de même bien agréable à voir, le travail bien fait. » (Michel Duran, Le Canard enchaîné, 9 septembre 1959).