Between the Lines

« Avec Between the Lines, Joan Micklin Silver produit peut-être la première réflexion autocritique consciente sur le mouvement protestataire des années 60 et sur sa réabsorption dans le système (Lorenzo Codelli, Positif n°199, novembre 1977). Cette réflexion, à travers le second long métrage totalement indépendant de Joan Micklin Silver, est nourrie des expériences personnelles de la cinéaste (qui écrivait dans The Village Voice à New York à la fin des années 60) et du scénariste-journaliste Fred Barron.

The Back Bay Mainline est né dans les années 60, fort des nombreuses luttes à mener. Il est le produit d’une contre-culture alors essentielle. Mais quelques années plus tard, l’utopie a laissé la place à la démobilisation, au cynisme, au désarroi et à la perte de croyance. Ses journalistes, parfois primés pour leurs enquêtes, cherchent désormais le sujet qui va réveiller leur combativité d’antan.

Dans ce film choral, sur le ton de la comédie de mœurs, Joan Micklin Silver plonge dans ce microcosme et observe ses personnages et leurs interactions. Souvent coincés, en outre, par leurs problèmes personnels, les membres de l’équipe s’interrogent : certains s’accrochent aux principes fondateurs du journal, d’autres commencent à leur tourner le dos. Fabuleuse galerie de portraits (le casting révèle des comédiens peu connus à l’époque, dont Jeff Goldblum, en excellent critique rock au teddy rouge satiné), le film questionne le rôle de la presse libre et la difficulté à conserver ses convictions de jeunesse alors que la vie « adulte » appelle à certaines responsabilités : « un tournant de l’âge et de l’époque » (Florence Maillard, Cahiers du cinéma n°757, juillet-août 2019).

« Ils sont jeunes, talentueux et ambitieux et ont eu la chance de s'engager avec enthousiasme et d'avoir eu une vie professionnelle identique à leur vie privée. La chance qu'ils ont eue, ils ne commencent à s'en rendre compte que maintenant que le temps est passé. Les années 60 sont devenues leurs « roaring 20's », leurs années folles. Between the Lines parle ainsi de continuer à grandir une fois devenu adulte. » (Vincent Canby, The New York Times, 28 avril 1977)