Cœurs

13^ème arrondissement de Paris, près de la Bibliothèque François-Mitterrand, quartier étrange où le vieux Paris côtoie des bâtiments modernes, encore inhabités. Trois hommes, trois femmes et une voix (le personnage d’Arthur n’est pas visible à l’écran) se croisent sous une troublante neige continue. Cœurs est un enchaînement de tableaux où se mêlent humour et gravité et dans lequel les personnages, magnifiquement interprétés par la troupe d’acteurs de Resnais, font face à une détresse sentimentale existentielle.

« Au sommet de son art, Resnais tire malicieusement les fils de ces marionnettes encombrées par des schémas familiaux et sème de la neige sur hommes, femmes, spleens, conviant les égarés à franchir l’écran des particules élémentaires, à fantasmer sur l’écran de leurs nuits blanches. » (Jean-Luc Douin, Le Monde, 3-4 septembre 2006).

Pour son dix-huitième long métrage, Alain Resnais adapte la pièce Private Fears in Public Places d’Alan Ayckbourn, célèbre dramaturge britannique, auteur d’Intimate Exchanges, dont il avait déjà tiré Smoking / No Smoking. Le cinéaste recevra le Lion d’argent du meilleur réalisateur à la Mostra de Venise en 2006, prix qui récompensera l’impressionnante précision de sa mise en scène.

« J’aime beaucoup le théâtre d’Alan Ayckbourn. D’un côté, il y a le burlesque, la loufoquerie, la férocité parfois. Et de l’autre, la compassion, la tendresse pour les faiblesses de ses personnages. […] Et puis dans la quarantaine de pièces que je connais, il y a toujours une recherche formelle. Moi, je suis un formaliste acharné. Je pense que la forme compte plus que le fond, ou qu’en tout cas, le fond ne peut pas passer si on ne trouve pas une forme. […] Par ailleurs, aucun auteur ne m’a fait autant rire que lui. » (Alain Resnais, Les Inrockuptibles n°572, 14 novembre 2006).