La Dernière Étape

La cinéaste Wanda Jakubowska passa deux ans dans les camps de concentration d’Auschwitz-Birkenau et survécut. Sa coscénariste, Gerda Schneider, fut déportée dans plusieurs camps durant neuf années. Dès sa libération,Wanda Jakubowska pense à réaliser un film sur les camps et leur organisation, notamment les réseaux féminins de résistance. Mais elle ne veut pas faire un récit autobiographique. L’histoire qu’elle porte à l’écran est celle de Mala Zimetbaum, dite "Mala la Belge", une jeune femme qui parlait sept langues et était devenue traductrice. Sa position avantageuse dans le camp lui permit de venir en aide à ses codétenues. Après avoir réussi à s’échapper, elle fut rattrapée par les SS et condamnée à la pendaison. Lors de son exécution, Mala parvint à défaire le nœud qui retenait ses poignets, gifla un officier et se taillada les veines.

« C’est une véritable synthèse cinématographique de la vie dans un camp. Aucun visage dans ce kaléidoscope multiple ne montre un seul reflet d’un art dramatique feint. […] Ce film polonais est vraiment très grand par sa valeur et sa mission, car il rappelle aux vivants le message de ceux qui sont morts : " Veillez ! " (Alena Bykova, Parallèle 50, 18 juin 1948).

Le tournage a lieu à Auschwitz-Birkenau. Le sol est retourné afin de recréer la boue des camps. Les figurants sont pour la plupart d’anciens déportés de nationalités différentes. Ce film, d’une rare puissance, est une œuvre-clé du cinéma polonais. D’un terrible réalisme, La Dernière Étape est le premier témoignage sur une réalité insoutenable. « Il faudrait que des millions et des millions d’hommes voient ce film, parce qu’ils ne pourront plus, à moins d’être des monstres, ne pas être contre la guerre, contre n’importe quelle guerre, contre toutes les guerres ». (Jeander, Libération, 29 septembre 1948)