Jean Renoir, qui tente de monter son projet depuis plus de deux ans, n’arrive pas à convaincre les producteurs. C’est l’intervention de Jean Gabin qui va lui permettre de trouver des financements. Le début du tournage est marqué par un coup de théâtre : sans en informer le réalisateur, la production engage Erich von Stroheim, dont Renoir est un immense admirateur. Il lui crée alors un rôle sur mesure : celui du commandant von Rauffenstein.
Le film sort en 1937, salué par la critique et le public. Mais en octobre 1940, les autorités d’occupation interdisent sa diffusion pour son absence d’idéologie patriotique et ordonnent la destruction des copies et des négatifs. Personne ne sait où est le négatif original, pas même Renoir, persuadé que celui-ci a disparu dans un bombardement. Sauvé par les Archives de Moscou, La Grande Illusion ressort en salles en 1946 et connaîtra un immense succès.
« La Grande Illusion, le moins contesté de tous les films de Renoir, est construit sur l’idée que le monde se divise horizontalement, par affinités, et non verticalement, par frontières » (François Truffaut, Les Films de ma vie, Flammarion). Ainsi se crée une amitié toute naturelle entre détenus russes, français, britanniques mais aussi avec leurs geôliers allemands. Car ici il n’est pas question d’appartenance nationale ou politique mais de reconnaissance tacite entre classes. Si de Boëldieu et von Rauffenstein partagent une complicité d’aristocrates, Maréchal et Rosenthal, lorsqu’ils s’évadent, sont recueillis par Elsa, une paysanne allemande.
Interdit en France, le film le fut également en Italie par Mussolini et en Allemagne par Goebbels qui le désigna « ennemi cinématographique numéro un ». En effet, plus qu’un film sur la fraternité universelle, La Grande Illusion est une œuvre pacifiste. Dans un discours que Jean Renoir avait écrit pour les États-Unis en 1937, il déclare : « Parce que je suis pacifiste, j’ai réalisé La Grande Illusion. Pour moi, un vrai pacifiste c’est un Français, un Américain, un Allemand authentique. Un jour viendra où les hommes de bonne volonté trouveront un terrain d’entente. Les cyniques diront, qu’à l’heure actuelle, mes paroles révèlent une confiance puérile, mais pourquoi pas ? Aussi gênant soit-il, Hitler ne modifie en rien mon opinion sur les Allemands ». (cité dans Premier Plan n°22-23-24, 1962).
La Grande Illusion
France, 1937, 1h53, noir et blanc, format 1.37
Réalisation : Jean Renoir
Scénario & Dialogues : Jean Renoir, Charles Spaak
Photo : Christian Matras
Musique : Joseph Kosma
Montage : Marguerite Renoir
Décors : Eugène Lourié
Costumes : René Decrais
Production : Les Réalisations d’Art Cinématographique
Interprètes : Jean Gabin (le lieutenant Maréchal), Pierre Fresnay (le capitaine de Boëldieu), Erich von Stroheim (le commandant von Rauffenstein), Marcel Dalio (Rosenthal), Dita Parlo (Elsa), Julien Carette (Traquet), Gaston Modot (l'ingénieur du cadastre), Jean Dasté (l'instituteur), Georges Péclet (Cartier, le serrurier), Sylvain Itkine (Demolder), Jacques Becker (un officier anglais), Claude Sainval (Ringis), Albert Brouett (un prisonnier), Werner Florian (Krantz)
Sortie en France : 8 juin 1937
Présentation à la Mostra de Venise : 18 août 1937
Restauration 4K inédite supervisée par Studiocanal et la Cinémathèque de Toulouse, et réalisée par le laboratoire L’Immagine Ritrovata (Bologne).
Distribution : Carlotta Films
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