D’abord, la légende noire de La Porte du Paradis : par son exigence, son ambition, sa folie et son échec au box-office, Michael Cimino a fait tomber à lui tout seul un studio hollywoodien – United Artists –, ce qui lui valut l’opprobre et un exil intérieur dont il n’est jamais totalement sorti. Pourtant, ce film au tournage dantesque (Cimino n’omettait jamais de mentionner sa productrice Joanna Carelli) et au casting prestigieux (Kris Kristofferson, Christopher Walken, Jeff Bridges et Isabelle Huppert) reste l’une des œuvres les plus marquantes du cinéma américain des années 70.
Fresque vertigineuse, La Porte du Paradis expose un des épisodes les plus scandaleux de la construction des États-Unis, la sanglante guerre civile opposant les propriétaires terriens et les migrants venus d’Europe de l’Est, en forme d’extermination organisée. Sur ce fond historique d’un monde qui s’écroule, Michael Cimino peint également une histoire d’amour folle et libertaire. Des images sont inoubliables : la ronde des patins à roulettes, les paysages, la neige et la boue, l’irruption de l’Histoire, le bal, la marche des peuples et la violence des armes, et Isabelle Huppert, dont tous les hommes sont fous.
Après avoir été porté aux nues pour Voyage au bout de l’enfer en 1978, Michael Cimino est attaqué avec une violence rare. Il est taxé de mégalomanie et d’antipatriotisme par la critique américaine. Personne pourtant jusque-là n’avait montré l’Ouest américain de la sorte : « Si l’aspect politique de l’enjeu est si présent, idéologie réactionnaire des propriétaires fonciers et idéaux anarchistes de la plèbe, levée de la milice parmi les chômeurs d’un chantier, c’est aussi parce que la conquête de l’Ouest n’avait jamais été approchée comme un effet de la révolution industrielle et des grands exodes qui saignaient les campagnes du Vieux Monde. » (Yann Lardeau, Cahiers du cinéma n° 326, juillet/août 1981).
Restauré avec le concours de son auteur, La Porte du Paradis renaquit de ses cendres en 2012. Une libération pour Michael Cimino qui déclara alors : « J’ai vécu avec un beau ballon accroché à mon bras pendant des années. Aujourd’hui, c’est comme si le nœud s’était défait. Le ballon s’est envolé. Je suis libéré. »
La Porte du Paradis (Heaven’s Gate)
États-Unis, 1980, 3h36, couleurs, format 2.39
Réalisation & scénario : Michael Cimino
Photo : Vilmos Zsigmond
Musique : David Mansfield
Montage : Lisa Fruchtman, Gerald Greenberg, William Reynolds, Tom Rolf
Décors : Tambi Larsen, Jim Berkey, Josie MacAvin
Costumes : Allen Highfill
Production : Joann Carelli, United Artists, Partisan Productions
Interprètes : Kris Kristofferson (James Averill), Isabelle Huppert (Ella Watson), Christopher Walken (Nate Champion), John Hurt (Billy Irvine), Sam Waterston (Frank Canton), Brad Dourif (George Eggleston), Joseph Cotten (le Révérend Gordon Sutton), Jeff Bridges (John Bridges), Ronnie Hawkins (Wolcott)
Sortie aux États-Unis : 19 novembre 1980
Présentation au Festival de Cannes : mai 1981
Sortie en France : 22 mai 1981
Restauration numérique.
Distribution : Park Circus
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