« Prenons note, dès à présent, de cette évidence aveuglante : il n’y a personne, dans tout ce cinéma italien, si vaste et attachant, qui grimpe à la cheville de Fellini. […] Seul Federico peut d’une enjambée, franchir ce pont de fibres et de cristal qui mène à l’expression spontanée, naturelle, congénitale des grands poètes. » (Positif n°13, mars 1955). Le critique Robert Benayoun se montrait enthousiaste à propos de La strada, mais il n’était pas le seul. Ce film insolite allait rendre célèbre son réalisateur, en particulier en France, grâce à un accueil critique et public à l’unisson.
Pourtant, en Italie, la critique de gauche attaqua le film : Fellini trahissait le mouvement néoréaliste. Certes, le futur "Maestro" voyait dans ce mouvement la « mort certaine du cinéma », mais la rupture n’était pas encore consommée. On parla aussi de film chrétien. Mais si une scène se déroulait explicitement dans un couvent, le propos n'était pas vraiment là.
Dans l’Italie pauvre du début des années 50, une paysanne accablée vend sa fille simplette, Gelsomina. Elle devient l’assistante et, de fait, la compagne d’un hercule de foire, aussi violent que dénué de sentiments. Gelsomina s’accroche à la vie, dans ce vagabondage avec Zampano à bord d’une moto-roulotte miniature. Avec mélancolie, Fellini filme la fin des illusions, et l’apprentissage de l’âme dans un monde qui n’a que faire des miséreux. Et il fait, avec La strada, une violente critique de la condition féminine, là où, pour certains, la femme n’a guère plus d’utilité qu’un caillou.
Giuletta Masina avait déjà beaucoup tourné depuis 1946, mais son quinzième film la révéla au monde entier et Gelsomina fut le rôle de sa vie. « [Elle] crée de toutes pièces un personnage de cinéma aussi nouveau, aussi original que celui de Chaplin à ses débuts. L’émerveillement de Gelsomina devant le plus petit cure-dents, le plus infime des cailloux ou une vitrine d’équipement électrique, Giuletta Masina le rend d’un seul reflet du regard, d’une transparente mimique qui est l’anéantissement même de l’artifice. […] Elle crée l’innocence mythologique, rendue pour la première fois à l’écran par la seule trépidation de l’âme. » (art. cit.)
La strada
Italie, 1954, 1h48, noir et blanc, 1.37
Réalisation Federico Fellini
Scénario Federico Fellini, Tullio Pinelli
Dialogues Tullio Pinelli
Photo Otello Martelli
Direction artistique Enrico Cervelli
Musique Nino Rota
Montage Leo Catozzo
Décors Mario Ravasco (non créd.)
Costumes Margherita Marinari (non créd.)
Production Dino De Laurentiis, Carlo Ponti, Ponti-De Laurentiis Cinematografica
Interprètes Giulietta Masina (Gelsomina), Anthony Quinn (Zampano), Richard Basehart ("Il Matto"), Aldo Silvani ("Girafe"), Marcella Rovena (la veuve), Livia Venturini (la sœur)
Présentation à la Mostra de Venise : 6 septembre 1954
Sortie en Italie : octobre 1954
Sortie en France : 11 mars 1955
Ressortie prochainement
Restauration 4K par The Criterion Collection et The Film Foundation au laboratoire L’Immagine Ritrovata de la Cineteca di Bologna à partir d’un internégatif 35mm conservé par Beta Film GmbH. Financement pour la restauration fourni par The Hollywood Foreign Press Association.
Distribution : Les Acacias
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