Le Président

Au cours de l’année 1960, Henri Verneuil signe avec Jean Gabin et Michel Audiard un contrat pour trois films. Leur collaboration débute par l’adaptation du roman de Simenon, Le Président, qui reçoit quelques changements. Ainsi, la scène de l’interpellation à la Chambre des députés, absente du livre, est un moment d’anthologie. «  […] Verneuil a reconstitué un Palais Bourbon de studio, où les figurants s’apostrophent avec toute l’emphase radicale des républiques mortes, la Troisième et la Quatrième, alors encore présentes à toutes les mémoires : le film venait à son heure, c’était le temps où de nouveaux « nouveaux messieurs », vieux et frais gaullistes, se faisaient les dents, sans peine, sur le "régime des partis" et la toute-puissance de l’assemblée. » (Jean-Pierre Jeancolas, Jeune Cinéma n°69, mars 1973).

Le trio Verneuil / Audiard / Gabin est au sommet avec la mise en scène rigoureuse du premier, la verve féroce du deuxième et le jeu magistral du troisième. « Le Présidentaura beaucoup de succès, n’en doutez pas. Il y a toujours beaucoup de monde aux funérailles nationales » ironisa Jeander (Libération, 1er mars 1961). Le percevant comme un éloge du poujadisme, ainsi qu’une menace contre la V^e République naissante, la critique ne fut pas tendre avec le film. Pourtant, l’accueil du public fut inverse : Le Président fut un immense succès.

Lorsqu’on le découvre aujourd’hui, le film prend une toute autre ampleur. Au-delà de la performance de Gabin, Le Président est à voir comme une vitrine sociologique de la vie politique sous la IV^e République, la dénonciation des marchés financiers, la construction de l’Europe, l’éloge de la démocratie.