Les Vacances de Monsieur Hulot

Après l’immense succès de son premier film, Jour de fête (1949), Jacques Tati refuse d’utiliser une seconde fois le personnage du facteur, devenu pourtant si populaire : Monsieur Hulot, personnage inoubliable, naît ainsi en 1951. S’ensuivront deux ans de travail méticuleux pendant lesquels le cinéaste invente une centaine de gags. Les extraordinaires trouvailles de Tati ne relèvent pas de la blague gratuite mais sont le fruit d’une longue observation, sensible et minutieuse, du quotidien. Son cinéma est un révélateur du caractère loufoque mais aussi poétique de nos vies.

Monsieur Hulot va être un véritable cataclysme pour la petite station balnéaire, où chacun vit au rythme lent des marées. Agissant sans cesse contre l’ennui, toujours du côté de l’enfance et de la jeunesse, il est écarté par la société adulte. Il devient alors un intrus dans un monde morne et routinier, sa seule présence dénonçant le conventionnel et l’esprit de sérieux. « Regarder vivre Hulot, c’est avant tout toucher à l’absurde quotidien par le comique, ressentir une certaine incohérence et une certaine viscosité du monde, retrouver cette étrange impression de malaise et d’incommunicabilité qui marque les rapports humains. Mais c’est en même temps retrouver, pour soi-même peut-être, un certain bonheur d’être. » (Michel Subiela, Positif n°9, octobre 1953).

Alliant comique sonore et gestuel, les répétitions et l’humour burlesque, Jacques Tati transcende la réalité. Grâce à un travail très précis, le cinéaste transforme les flous, sons inaudibles et cadrages bancals, en éléments comiques inhérents au récit. Conjuguant désinvolture et précision, Tati livre une illustration savoureuse de la langueur des grandes vacances, au charme désuet et néanmoins intemporel.