Rosetta, Palme d’or en 1999, ouvre sur un choc : Rosetta, à peine sortie de l’adolescence, furieuse d’être licenciée, refuse de quitter l’usine. Elle veut comprendre, elle veut sa place.
Le quatrième long métrage de Jean-Pierre et Luc Dardenne est né du personnage de K. dans Le Château de Kafka, qui cherche obstinément sa place dans le village. Les cinéastes voulaient par ailleurs filmer une femme. « Cela nous a mis sur l’idée d’une fille qui est mise dehors, qui veut obtenir quelque chose qui lui permettrait de rentrer dans la société, et qui est tout le temps remise dehors. On a décidé d’en faire une fille obsédée, assiégée par une idée : avoir un travail pour être comme les autres et avoir une vie normale. » (Luc Dardenne) Et c’est Émilie Dequenne, alors inconnue, qui incarne ce personnage, la rage au ventre, la même qu’elle a mise pour décrocher le rôle.
On ne sait rien du passé de Rosetta. Prise sur le vif, elle vit dans un grand dénuement matériel, elle se bat, quoi qu’il en coûte. Elle n’est ni aimable, ni détestable. Elle est là. La caméra s’attache à la vérité des gestes, colle au plus près des protagonistes, derrière leur épaule, face à eux. Jamais loin. Tous se cognent à ce cadre serré, personnages comme spectateurs.
Œuvre brute et humaniste, Rosetta ne cède pas à l’empathie facile. Le film montre la cruauté insidieuse, la monstruosité banale, évite le piège du mélodrame et, évitant de tirer les larmes, assène un coup dans le bas-ventre. Pour Carole Desbarats, « Situation sociale extrême, amour dévoué, honte, rédemption, les principaux ingrédients du genre sont là mais peut-être entrent-ils dans une catégorie particulière de mélodrame, peu fréquentée, celle d’un mélo qui serre la gorge plus qu’il ne fait pleurer, qui n’épargne rien de la noirceur de la vie mais n’empêche pas d’y croire, et aussi – et c’est bien rare –, qui pense que les femmes peuvent être fortes dans l’adversité. » (Contre-Bande n°15, 2005) Et de terminer en citant Luc Dardenne : « Sortir d’une salle de cinéma apaisé, guéri… pur sentiment d’être un homme parmi les hommes. […] Garder l’œil sec, comme dans Scarface. »
Rosetta
Belgique, France, 1999, 1h35, couleurs, format 1.66
Réalisation & scénario : Jean-Pierre Dardenne, Luc Dardenne
Photo : Alain Marcoen
Musique : Jean-Pierre Cocco
Montage : Marie-Hélène Dozo
Décors : Igor Gabriel
Costumes : Monic Parelle
Production : Jean-Pierre Dardenne, Luc Dardenne, Laurent Pétin, Michèle Pétin, Les Films du Fleuve, RTBF, ARP Sélection
Interprètes : Émilie Dequenne (Rosetta), Fabrizio Rongione (Riquet), Anne Yernaux (la mère), Olivier Gourmet (le patron), Bernard Marbaix (le gérant du terrain de camping), Frédéric Bodson (le chef du personnel), Florian Delain (le fils du patron), Christiane Dorval (la première vendeuse), Mireille Bailly (la seconde vendeuse), Léon Michaux (le premier policier), Victor Marit (le second policier), Colette Regibeau (Mme Riga)
Présentation au Festival de Cannes : 22 mai 1999
Sortie en Belgique : 22 septembre 1999
Sortie en France : 29 septembre 1999
Distribution : ARP Sélection
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