The Amusement Park

Il est des films à l’histoire étrange. The Amusement Park est de ceux-là. Fin 2018, une révélation affole les fans de George A. Romero, disparu l’année précédente : outre plusieurs dizaines de scénarios non réalisés, le cinéaste a laissé un film achevé mais inédit, The Amusement Park…

Cinq ans après le choc inoubliable de La Nuit des morts-vivants, Romero est contacté par une organisation caritative luthérienne. La commande est pour le moins surprenante : le film devra éveiller les consciences sur les effets de la vieillesse, l’indifférence de la société et la maltraitance envers les personnes âgées. À l’origine de la restauration du film, la productrice et veuve du réalisateur, Suzanne Desrocher-Romero confiait en janvier 2020 au New York Times : « Pour être honnête, je ne sais pas s'ils ont réalisé quel genre de cinéaste était George A. Romero. »

Tourné dans le parc d'attractions West View (fermé depuis) dans les collines de Pittsburgh, The Amusement Park est un film étrange. Comme à son habitude, Romero utilise un lieu symbolique (comme, plus tard, les supermarchés). Ici le parc recèle des foules chaotiques et des montagnes russes, comme une allégorie du vieillissement.

Le film ne bénéficia pas d’une sortie grand public, et son exploitation se limita à de rares projections ciblées dans des centres communautaires. Mais il porte bien la signature de son auteur : il est terrifiant. L’auteur et professeur Tony Williams, qui l'a vu il y a plus de trente ans confirmait alors : « Le film est bien trop puissant pour la société américaine... Il doit rester sous clé et ne jamais voir la lumière du jour. » Pour l’écrivain Daniel Kraus (co-auteur avec Guillermo del Toro de Trollhunters et de la novellisation de La Forme de l’eau), The Amusement Park est une révélation : « Il n'a jamais été montré publiquement. Les personnes qui l'ont financé ne le permettraient pas. Pas étonnant. C’est infernal. Dans sa longue carrière, durant laquelle il a critiqué les institutions américaines, Romero n’a jamais été aussi impitoyable. »

Alors encore au début de sa carrière, Romero imposa son style à The Amusement Park. Film fou, fascinant, cette œuvre personnelle et pessimiste est toujours pleinement d’actualité, dans une société américaine où l’espérance de vie augmente mais dont les systèmes sociaux et de santé sont à bout de souffle. Une allégorie sociale brutale signée par le maitre de l’horreur.