Un taxi pour Tobrouk

Plaidoyer pacifiste sur l’absurdité de la guerre, Un taxi pour Tobrouk marque la cinquième collaboration de Denys de La Patellière avec le scénariste-dialoguiste Michel Audiard.

Tourné dans les paysages âpres de la sierra Alhamilla, au sud de l’Espagne, le film est une savoureuse peinture de caractères, déployant une galerie de personnages fortement typés, toujours plus prompts à parler qu’à se battre. Avec une rare sobriété, Denys de La Patellière met en scène la fatigue des corps, la progression lente et pénible, le sable brûlant et les horizons déserts, éclairés par la superbe photographie de Marcel Grignon.

Le commando bavard convoie lentement son prisonnier à travers les étendues arides. « Il faudrait toujours tuer l’ennemi avant de le connaître », déclare l’un d’entre eux. À vivre ensemble, on finit par se découvrir, peut-être par s’estimer. Pour ces soldats isolés, venus de tous les horizons, le désert libyen abolit les différences entre les hommes, amis ou ennemis.

Fable antimilitariste, le film est porté par les dialogues percutants d’Audiard, entre lyrisme et ironie. Mots d’auteur et tirades gouailleuses sont jetés avec brio par les deux acteurs vedettes. Lino Ventura, bourru et roublard dans la peau d’un ancien boxeur, marche d’un pas tranquille sur les traces de Gabin. Quant à Charles Aznavour, encore tout auréolé du succès du film d’André Cayatte, Le Passage du Rhin, il confirme son statut de grand comédien, dans le rôle émouvant d’un médecin juif en fuite.

À sa sortie, Un taxi pour Tobrouk connaît le succès et, avec presque cinq millions de spectateurs, atteint la troisième place du box-office de 1961. La postérité ne démentira pas ce triomphe : Un taxi pour Tobrouk est désormais un classique du cinéma français.