C’est la quatrième fois que le Tchèque Jiří Menzel (1938-2020), l’un des leaders de la Nouvelle Vague tchèque des années 60, adapte son mentor, l’écrivain Bohumil Hrabal (1914-1997) : il porte ici à l’écran La Chevelure sacrifiée, texte en partie autobiographique puisque le père de l’écrivain était brasseur et sa mère, dit-on, très belle. Le frère à la voix de stentor est inspiré de l’oncle de Hrabal, évoqué dans un autre livre.
En cette période de « normalisation », entre la fin brutale du Printemps de Prague et la Révolution de velours qui mettra fin au régime socialiste, Menzel troque son goût de l’ironie et de l’absurde pour des armes plus discrètes : le burlesque et la nostalgie. Pour lui, « le comique montre l'humanité. Le grotesque "ouvre" un homme et donne accès à l’intérieur ; c'est le plus court chemin pour explorer ce qu'il a en lui. Voyez Keaton, s'il court, s'il s'arrête, cela dit ce qu'il a dans la tête, on respire pour lui, c'est concret et plus fort que ce que dit un film réaliste. » (Jeune Cinéma n°139, décembre 1981) L’intrigue d’Une blonde émoustillante est contemporaine de l’âge d’or du burlesque – l’un des personnages cite à deux reprises l’acteur comique anglo-américain Lupino Lane (1882-1959) – et l’étude de caractères devient ainsi une extravagante et réjouissante sarabande.
Menzel dépeint ainsi un Eden englouti : une douceur de vivre où abondance et sensualité s’incarnent dans l’héroïne jouée par Magda Vášáryová (qui quittera le métier d’actrice pour la diplomatie et sera candidate malheureuse à l’élection présidentielle slovaque en 1999). Une beauté à la fois douce et terrienne comme le montrent, dans les premières scènes, le dépeçage d’un cochon, puis la préparation joyeuse du boudin. Il fait bon vivre et aimer (et boire et manger) dans cette Tchéquie de cocagne qui n’est plus, quand sort le film, qu’un souvenir.
Une blonde émoustillante (Postriziny)
Tchécoslovaquie, 1980, 1h38, couleurs, format 1.66
Réalisation : Jiří Menzel
Scénario : Bohumil Hrabal, d’après son roman La Chevelure sacrifiée
Photo : Jaromír Šofr
Musique : Jiří Šust
Montage : Jiří Brožek
Décors : Zbyněk Hloch
Costumes : Zuzana Máchová
Production : Studios Barrandov
Interprètes : Magda Vášáryová (Maryška), Jiří Schmitzer (Francin), Jaromir Hanzlik (Pepin), Rudolf Hrušínský (le docteur), Oldřich Vízner (le coiffeur), Oldřich Vlach (Ružička)
Sortie en Tchécoslovaquie : 1er février 1981
Présentation à la Mostra de Venise : 2 septembre 1981
Sortie en France : 1er mars 1989
Ressortie le 11 novembre 2020
Restauration numérique 4K de The National Film Archive de Prague.
Distribution : Malavida
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